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Chant Quatrième

C’était l’hiver au royaume des îles et voilà bientôt plus d’un an que le Géant des Iles avait vu disparaître la voile d’Ydrin le jeune. Malgré la paix sereine régnant sur le royaume, le Géant ne pouvait plus contenir son inquiétude car de toutes parts ses messagers étaient revenus sans nouvelles de Drewen le Roux, tous sauf un. Or il arriva que le messager retourna de sa mission, ayant parcouru le royaume d’Edenar en tous sens il avait enfin apprit ce que son seigneur désirait tant savoir. Le messager était un brave et bien qu’il eu passé plusieurs longues années loin de sa maison, parcouru maintes lieues sur terre comme sur mer, il ne prit aucun repos et aussi fraîchement débarqué que le poisson du matin il se précipita au château.

 

« Seigneur ! Seigneur ! Me voici de retour avec des nouvelles ! »

 

Le Géant fut saisi de voir son ami revenir et après une accolade de rigueur lui enjoint de tout raconter de ses voyages, le message s’installa et les servants vinrent lui apporter vin et nourriture alors qu’il faisait son récit.

 

« Grand roi des îles j’ai conformément à ton vœu cherché la trace de ton cousin Drewen le Roux dans toutes les terres d’Edenar du Royaume de l’Est, ce fut une quête longue et ardue car je ne devais en aucun cas rencontrer d’homme d’Edenar sur ma route. J’ai voyagé de nuit et évité les villes, j’ai demandé le gîte à nos cousins vivant sous les collines et dans les forêts ; je ne trouvais aucune nouvelle de Drewen nulle part et même les animaux ne savaient goutte à son endroit. Mais alors que je devais m’en retourner vers nos îles bien aimées j’eu vent qu’un chevalier à la chevelure flamboyante avait été vu dans les montagnes menant hors du royaume d’Edenar. Je suis allé moi-même près des bornes-frontière du Nord et j’y ai trouvé des montagnards qui m’ont guidé, il y avait là un lac aussi brillant que l’argent et dont les eaux étaient calmes comme l’huile ; c’est au bord de ses eaux qu’un tertre avait été élevé. C’est grand malheur mais c’est là que repose ton cousin Drewen le Roux, il fut tué par un chevalier aux armes noires qui se veut maître des montagnes. Je ne l’ai point rencontré mais de source sûre je sais que ces montagnes sont bien les terres d’Edenar du Royaume de l’Est et qu’on le tient pour le plus grand chevalier qui fut dans le peuple des hommes, aussi nul n’oserai contester son droit sur la région dont je te parle. »

 

Ce n’était pas la première fois que le Géant des Iles entendait venter la force d’Edenar du Royaume de l’Est aussi il ne douta en rien du récit que l’on venait de lui faire, il soupira de lassitude et s’appuya sur son immense épée pour se relever de sa chaise.

 

« C’est là une bien triste nouvelle mais je ne puis pleurer mon cousin dont la dépouille gît dans la terre des hommes, quelle que soit la vérité derrière notre affaire Edenar devra répondre de la mort dans laquelle il précipita Drewen le Roux en usurpant son fief. Ami repose-toi car tu vas reprendre tes errances, mais cette fois-ci tu ne partira pas seul car chaque chevalier de mon royaume te suivra en armes, je lève l’armée des géants et puissent les puissances prendre pitié des hommes du Royaume de l’Est. »

 

Il ne fallut guère plus de trois lunes pour que l’armée des géants fut en ordre de marche, étendards flottant au vent ils firent leurs adieux à la terre bienheureuse de leurs ancêtres et embarquèrent dans des navires aux voiles noires du deuil. Avec fracas les géants touchèrent terre un matin de brouillard, ce fut un berger qui aperçut leur armée se dévoiler avec les rayons du soleil, il y avait là plus de chevaliers, de piquiers et d’archers qu’il n’en pu compter aussi se rua t’il à Dwyrmilin aussi vitre que ses jambes purent le porter. Le long de la route il hurla à qui voulait l’entendre la nouvelle.

 

« Fuyez ! Fuyez ! Le peuple des géants a été lent à se mettre en colère mais le voilà sur nous les armes à la main ! »

 

La nouvelle atteignit le seigneur de Dwyrmilin qui bien que concerné pour le bien-être de ses gens n’en était pas moins un homme de guerre, il se fit armer et convoqua ses chevaliers afin qu’un détachement aille à la rencontre des géants, il fit mander ses meilleurs cavaliers dont Ydrin le jeune et leur confia à chacun une lettre pour le roi Edenar, après quoi il se mit en route. Chacun redoutait les Géants qui n’avaient pourtant pas guerroyé contre le peuple des hommes depuis des générations, mais de tous seul Ydrin savait vraiment avec quelle ardeur ces braves gens pouvaient se battre quand ils y étaient amenés. Les messagers s’en allèrent sans attendre, si ce n’est Ydrin qui prit le temps de prendre provisions et vêtements pour son voyage, avant qu’il ne fut parti les gens de Jan le Sonneur rencontrèrent l’armée des géants dans le pré. Le Géant des Iles portait ses armes vermeilles et attendait monté que la délégation adverse vînt à lui, d’un ton sec il leur dit.

 

« Je viens d’au-delà des mers comme la tempête furieuse, qu’Edenar du Royaume de l’Est se présente face à moi sans plus attendre pour répondre de ses méfaits, ils m’ont coûté la vie de gens de ma parenté qui m’étaient très chers et pour cela il n’y aura nulle rançon autre que la mort ! »

 

Jan le Sonneur était sénéchal d’Edenar, ayant combattu à ses côtés dans les plus âpres combats il ne comptait pas livrer son compagnon sans se battre, il baissa la visière de son heaume et défia le Géant des Iles.

 

« Par l’honneur sa majesté Edenar n’a pas attaqué votre royaume aussi vous le calomniez traîtreusement, venez donc tâter de ma lance puis repartez sur vos navires dans vos terres qui toutes lointaines qu’elles sont ne le seront jamais assez ! »

 

Le Géant n’avait d’yeux ou d’oreilles que pour celui qui lui avait causé du tort aussi ne prit il même pas la peine de répondre au défi de l’homme, un de ses chevaliers le fit pour lui et tout habile que fut le sénéchal il finit par vider ses étriers, un tronçon de lance enfoncé dans l’épaule. Chaque chevalier tenta à son tour de réparer l’honneur du Royaume de l’Est mais la défaite fut cuisante, les hommes furent renvoyés vers Dwyrmilin qui fut ensuite assiégée et prise en otage tant qu’Edenar ne viendrait pas se présenter au Géant des Iles.

Il passa un jour et le premier des cavaliers arriva à la cour d’Edenar, c’était Ydrin et il s’agenouilla face à la table de banquet où le roi se tenait, lequel lui intima de se redresser.

 

« Qui es tu et d’où viens tu valet ? »

 

Ydrin produisit la lettre de son seigneur et répondit à la question sans manières.

 

« Mon nom est Ydrin et je viens de Dywrmilin porteur de nouvelles, votre sénéchal le brave Jan le Sonneur est en ce jour l’otage du Géant des Iles. »

 

Edenar fut choqué par la nouvelle tant par sa soudaineté que par sa nature.

 

« Hélas tu dis vrai car c’est bien là le sceau de mon sénéchal ! »

 

Verdian fils de Jan se trouvait présent dans l’assemblée où sa réputation lui avait valu bien des honneurs, profitant des plaisirs de la cour depuis assez longtemps il s’éleva.

 

« Votre majesté prenons les armes et allons bouter les géants jusqu’à la mer ! »

 

Chacun savait la valeur du chevalier aux armes bleues et ne douta pas qu’en sa compagnie il eu été possible de battre les gens du Géant des Iles, mais le roi Edenar connaissant la réputation honorable du roi des îles en décida aautrement.

 

« Il n’y a nul besoin que la guerre s’étende à ceux qui ne l’ont point voulue, vaillant Verdian aux armes bleues allez avec quelques gens défendre notre honneur auprès du Géant des Iles, il est seigneur raisonnable et acceptera sûrement de régler la chose entre gens d’épée seulement. »

 

Verdian se voyait partir avec l’ensemble de la puissante armée des hommes mais piégé par son orgueil fou il fut obligé de s’exécuter pour ne pas se couvrir de honte, quittant l’assemblée il fustigea son ancien écuyer du regard et disparut. Le roi retourna son attention vers le messager.

 

« Tu as bien fait ton office, à présent dispose et prends du repos car tu as du mener bon train pour arriver jusqu’à nous aussi vite. »

 

Ydrin refusa poliment l’offre du roi, la cour s’offusqua de cette impudence mais le roi curieux demanda des explications.

 

« Votre majesté j’ai voyagé vite mais je me suis ménagé tout comme ma monture, s’il est autre chose en quoi je puisse servir sa majesté qu’elle ordonne. »

 

La réponse plut au roi qui décida alors de renvoyer le jeune homme.

 

« Tu iras à Dwyrmilin et me rapportera comment Verdian aux armes bleues a défendu mon nom. Prends un de mes chevaux si tu le désire, il te portera aussi vite que cheval le peux. »

 

Ydrin s’inclina.

 

« Je serai de retour aussitôt qu’un des chevaliers en lice goûtera la poussière, mais je prie sa majesté de ne pas prendre ombrage de mon refus de changer de monture. Le cheval avec lequel j’ai cheminé depuis Dwyrmilin est un fidèle compagnon, il porta le champion de votre dernier tournoi d’automne aussi saura t’il se montrer digne de son roi. »

 

Ydrin quitta la salle du banquet et refit provision pour la route, puis il monta en selle et galopa vers Dwyrmilin sans attendre ; le lendemain au point du jour il  passa les lignes de l’armée des géants le visage caché par une capuche puis fut amené au chevet de Jan le Sonneur. Le seigneur de Dwyrmilin souffrait beaucoup et nul chirurgien n’avait su apaiser le mal causé par le tronçon de lance fiché dans son épaule. Le blessé fut cependant soulagé en voyant revenir le jeune palefrenier et lui dit de s’approcher de son oreille pour délivrer la réponse du roi.

 

« Hélas seigneur, le roi Edenar n’a jugé bon que d’envoyer votre fils pour vous secourir ; je le dis votre seul soulagement sera de le voir auprès de vous avant la fin du jour car il sera battu par les chevaliers du Géant des Iles. »

 

L’avis d’Ydrin plongea Jan le Sonneur dans une rage sans nom, il le traita de tous les noms et demanda à ce qu’il fut jeté aux oubliettes ; Ydrin ne songeant pas à mal en émettant un avis objectif fut en retour courroucé au-delà de sa correction et de son affection pour le sénéchal.

 

« La paix car à votre service je n’ai jamais menti et toujours été loyal, le jour vous montrera bien qu’en tous points j’ai dit pure vérité et je repartirai car tels sont les ordres du roi votre suzerain ! »

 

Gestes à l’appui Ydrin s’empara du tronçon de lance et d’un geste vif le retira de la plaie du sénéchal ce qui soulagea beaucoup ce dernier, vidé de ses forces Jan le Sonneur s’évanouit et tous ses gens furent si alarmés qu’ils en oublièrent Ydrin. Vers la fin du jour alors que la brume tombait sur la côte, les délégations se rencontrèrent encore dans le pré ; Ydrin s’était approché et observait du haut de la colline, en aucun cas il n’eu voulu être confronté à son bienfaiteur le Géant des Iles alors qu’il avait le devoir de servir son ennemi au mieux. La rencontre fut brève et Verdian tout véhément qu’il fut tomba de son cheval dès la première passe, Ydrin ne s’attarda pas pour profiter de la déconvenue de celui qui lui avait fait du mal car il avait mieux à faire. Pendant ce temps les autres messagers avaient enfin atteint la cour du roi Edenar, lequel avait sur un pressentiment d’homme usé par maintes guerres fait réunir ses vassaux pour chevaucher face à l’armée des géants si son champion venait à être défait. Le jour suivant Ydrin avec la régularité du soleil levant entra dans la salle du trône, le roi lui réserva un très bon accueil.

 

« Voyez venir le cavalier le plus rapide du royaume, c’est grand prodige d’avoir accompli tant de chemin alors que ceux qui partirent avant toi de Dwyrmilin ne sont arrivés qu’hier dans la journée. Dis moi je te prie jeune valet quelles sont les nouvelles ? »

 

Ydrin s’inclina.

 

« Hier à la tombée du jour Verdian qui possède les armes bleues a été défait par un des gens du Géant des Iles. »

 

La stupeur frappa l’assemblée, le roi pâlit et demanda au messager les détails du combat.

 

« Ce doit être un bien terrible chevalier qui a défait Verdian aux armes bleues, je ne serai pas surpris s’il s’agissait du roi des îles lui-même ; mais raconte moi tout jeune Ydrin. »

 

Ydrin se racla la gorge et sans plaisir raconta ce qu’il avait vu.

 

« Verdian jouta contre Maleor le Pâtre qui est le plus jeune des vassaux du Géant des Iles, il brisa sa lance contre le bouclier de Maleor et vida les étriers lors de la première passe. Les chevaliers l’accompagnant l’ont mis sur une litière et conduit auprès de son père à Dwyrmilin, père et fils sont maintenant alités côte à côte »

 

Dans l’assistance la dame qui était l’amie de Verdian aux armes bleues s’effondra en pleurs, elle traita Ydrin de menteur et le voua aux puissance des ténèbres, le jeune homme maintenant usé à se faire malmener de la sorte ne bronche même pas. Le roi soupira et déclara à l’assemblée.

 

« Il ne reste plus d’autres solutions que de lever notre armée et marcher sur Dwyrmilin, que tous les seigneurs fassent leurs serments et s’arment sur l’heure ! »

 

Puis alors que le roi allait lui aussi quitter la salle pour revêtir ses armes, il s’aperçut que restait seul au milieu de la salle le jeune messager.

 

« Dis moi jeune homme quelle serai la juste récompense pour tes loyaux services ? »

 

Ydrin s’inclina et se rapprocha de quelques pas afin que nul autre n’entende.

 

« Votre majesté connaît déjà la réponse à cette question qu’elle me posa jadis, je ne désire rien d’autre que de voir combattre le meilleur chevalier du peuple des hommes. »

 

Le roi fut profondément troublé par cette réponse et dans la hâte ordonna qu’Ydrin fut celui qui prenne soin des destriers royaux. Ce fut la plus belle armée que rassembla jamais le peuple des hommes qui quitta ce jour la cour du roi Edenar, ce n’était partout qu’armures et mailles brillantes sous le soleil glorieux, étendards fiers claquant dans le vent de la guerre ; il n’y avait nulle compagnie au monde qui rassembla tant de vaillants et honorables chevaliers qu’en ce jour Malgré la peine que causaient les nouvelles de Dwyrmilin au roi Edenar, ce dernier ne put que s’enorgueillir de cheminer en aussi bonne compagnie ; sur la route il fit appeler Ydrin afin qu’il cheminât à ses côtés, ils devisèrent longtemps et le roi fut bien étonné de la bonne éducation du palefrenier ; cependant à chaque fois qu’il lui demanda de quelle maison venait le jeune homme ce dernier lui fit la même réponse polie.

 

« Mon roi j’ai jadis promis au plus honorable seigneur de cette terre qu’il existe après vous de ne point révéler le nom de ma parenté, quoi qu’il me coûte de ne pas vous donner satisfaction je ne me défilerai pas à ma parole. »

 

Le roi appréciait le jeune homme et trouva fort honorable sa conduite, il changea donc de sujet et tous deux parlèrent encore longtemps de poésie et de chevaux ; sous les conseils d’Ydrin l’armée arriva en vue de Dwymilin juste avant que midi ne sonne au lendemain de leur départ. Le roi fit camper son armée dans le pré et envoya un messager prier le Géant des Iles après le déjeuner afin que l’on sache quels étaient les meilleurs chevaliers des géants ou des hommes. Le déjeuner fut joyeux bien que l’absence du brave Jan le Sonneur pesa sur le cœur du roi Edenar comme sur celui du jeune Ydrin, ce dernier craignait que le sénéchal ne s’en soit allé sur les dernières mauvaises paroles qu’ils avaient échangés. Et durant le repas, une vieille entra sous la tente, seuls quelques uns reconnurent alors la vieille prophétesse qui avait conduit il y a bien des années Edenar à chasser le cerf au pelage doré. Le roi se leva et lui fit le meilleur des accueils, mais elle refusa de s’asseoir à sa table et dit ce qui l’amenait là.

 

« Roi Edenar mes conseils t’ont jadis été profitables aussi écoute celui-ci, car en vérité je vous le dis à tous ce jour sera le plus glorieux du royaume depuis que le jour béni ou Edenar le sobre accéda au trône. En ce jour, sur cette lande le meilleur chevalier du peuple des hommes va terrasser l’invaincu Géant des Iles. »

 

L’assemblée des chevaliers accueillit la nouvelle avec un soulagement immense et tous s’accordèrent à dire qu’Edenar allait sans aucun doute vivre sa plus grande victoire ; mais la vieille frappa le sol de son bâton et déclara.

 

« Fous ! Ce n’est pas Edenar qui vaincra le Géant des Iles mais le chevalier aux armes bleues qui remporta le dernier tournoi de l’automne, et en vérité Edenar sera heureux car il y gagnera bien plus que le titre de meilleur des hommes qu’il porta jadis. Ainsi j’ai parlé, à présent roi Edenar je te quitte. »

 

Le roi se leva encore et l’interrompit.

 

« Nous reverrons nous magicienne ? »

 

La vieille secoua la tête d’un air grave.

 

« C’est je le crains ta dernière aventure roi Edenar, tel est le dessein que les puissances avaient pour toi. »

 

Le roi fut ému de la prédiction et voulut remercier la vieille de la bonté qu’elle avait apportée sur sa vie, il s’agenouilla et embrassa sa vieille main ridée.

 

« La force s’incline devant la sagesse, c’est toujours ainsi qu’il devrait être. »

 

La vieille disparut et les compagnons du roi tentèrent de faire bonne figure malgré la terrible prédiction de la vieille femme, qui plus est d’aucun sauf le roi et Ydrin ne savait à ce moment que Verdian n’était pas le chevalier qui remporta le tournoi de l’automne, à chacun la bataille semblait perdue d’avance. Et l’armée adverse s’avança dans le pré avec le soleil, des messagers échangèrent les salutations d’usage, malgré la prévenance d’Edenar les réponses du Géant des Iles portaient sa détermination à voir la perte du royaume de l’Est. Les rois restèrent chacun à observer l’armée adverse alors que leurs chevaliers se faisaient face, un par un ils chevauchèrent face à leurs adversaire pour lancer leurs défis. Les combats furent d’une ardeur sans pareille, les géants avaient la force mais les chevaliers d’Edenar étaient habiles et courageux, cependant quand on en venait à l’épée immanquablement les hommes étaient vaincus. Les géants bien que leur détermination fut grande n’en aimaient pas moins la paix aussi accordèrent ils tous grâce à leurs valeureux adversaires. Le roi Edenar pâlissait alors que ses chevaliers étaient défaits, un à un ils revinrent tous avec le même message :

 

« Le Géant des îles accordera merci à tous les hommes de ce royaume si Edenar du Royaume de l’Est qui lui causa grand tort viens se livrer à lui. »

 

Edenar ne put que se résigner et appela alors Ydrin.

 

« Bel ami le temps est venu pour les prophéties de s’accomplir, que l’on amène mes armes, Edenar du Royaume de l’Est ne partira pas sans combattre. »

 

Nombre des chevaliers du royaume assemblés autour du roi gémirent de la douleur de leurs blessures et de la peine que leur faisait l’annonce, l’un d’eux s’exclama :

 

« Mais seigneur la vieille l’a dit, si vous combattez alors ce sera là votre dernière aventure ! Et Verdian aux armes bleues n’est pas là pour défaire notre ennemi ! »

 

Ydrin qui avait quelque peu appris du savoir de la sorcière ayant fait son baptême médita les mots échangés, puis s’approcha de l’oreille du roi.

 

« Seigneur laissez moi combattre sous vos couleurs car en vérité je peux l’emporter du Géant des Iles lui-même, et ce serai là votre dernière aventure car après celle-ci votre royaume pourrai ne plus jamais connaître les affres la guerre. Je n’aurai qu’à revêtir vos armes et… »

 

Le roi se retourna l’air grave et sortit son épée du fourreau, Ydrin ne bougea pas et se dit qu’il avait en quelque façon déplu au souverain en lui proposant de prendre ses armes ; il fit face et se prépara à recevoir son dû quel qu’il soit.

 

« A genoux Ydrin. »

 

Ydrin s’exécuta.

 

« Si j’ai déplu à votre majesté en quelque façon… »

 

L’épée s’abaissa vers lui, lui intimant le silence.

 

« La noblesse s’acquière par les armes et vous devriez pouvoir faire les vôtres au lieu de porter celles d’un autre, bien que vous ne vouliez souffler mot de votre lignage je n’en crois pas moins que vous êtes digne d’appartenir à notre fraternité et tous savent ici que je m’y entend pour estimer la valeur d’un homme. »

 

L’épée s’abaissa encore pour effleurer les épaules du jeune homme, les chevaliers défaits ne comprenaient qu’à moitié leur souverain jusqu’à ce que celui-ci demande au jeune homme.

 

« Par quel nom désires tu être connu de tes pairs chevalier ? »

 

Ydrin n’avait que peu de désirs que celui de se montrer digne de ses adversaires, il hésita.

 

« Je n’ai pas accompli d’exploits pour que l’on me connaisse sous un autre nom que celui qui m’a vu naître. »

 

Le roi sourit devant la modestie du jeune homme qui eu pu être appelé champion de l’automne ou bien ami des chevaux, mais un seul hommage convenait alors et le souverain savait que c’était le signe que ces gens attendaient tant.

 

« Et pourtant on reconnaîtrai sûrement mieux ta valeur en sachant de toi que tu es Ydrin le chevalier aux armes bleues car je ne peux me tromper, je ne connais aucun autre chevalier qui monte un palefrois à ta façon. »

 

Un chevalier de la cour fixa les éperons à Ydrin et le roi lui donna l’accolade, lorsque l’on lui ceint l’épée il sentit que désormais il était devenu un homme et qu’il pourrai faire face aux siens le regard fier. Mais le roi ne s’arrêta pas là, il demanda tout de même que ses serviteurs l’arment ; il n’en fut rien tant même les blessés se levèrent de leur civière pour pouvoir placer avec déférence une partie de son armure sur sa personne, Ydrin lui porta son bouclier.

 

« Même une magicienne peut se tromper majesté, vous resterez à n’en pas douter le meilleur chevalier du peuple des hommes et il me plaira de vous voir combattre. »

 

Un messager royal alla jusqu’à Dwyrmilin faire quérir les armes bleues de Verdian fils de Jan le Sonneur, alors qu’Ydrin s’armait du haut de la colline le roi s’avança seul dans le pré avec son étendard au vent ; et de tous eurent à jamais cet instant gravé dans leurs cœurs car c’était la dernière chevauchée d’Edenar souverain du Royaume de l’Est et noble chevalier du peuple des hommes. Le Géant des Iles s’avança mais alors qu’il voulait engager le combat Edenar releva sa visière et lui tînt ce discours.

 

« Roi des géants je ne sais quel tort affreux j’ai pu te causer mais sache que malgré toute la force et l’adresse dont tu fera preuve aujourd’hui tu ne pourra avoir raison de moi, j’ai fait un serment à la dame de mes pensées et je n’aurai de cesse d’attendre son retour malgré les hommes comme les puissances !  A présent si tu veux toujours persister dans cette folie qui nous a coûté tant de nos bonnes gens alors battons nous ! »

 

Edenar s’écarta de son adversaire et rabaissa sa visière, le Géant des Iles le chargea avec férocité mais le roi ne bougea pas d’un pouce, au dernier moment il donna de son bouclier avec tant d’adresse que malgré toute la puissance de son adversaire la lance glissa dessus comme le canard sur l’eau d’un lac limpide. Le Géant revînt à la charge et cette fois-ci usa d’un de ses tours de lance les plus mortels, il percuta le bouclier d’Edenar à plat et envoya celui-ci au sol avec violence ; le roi des hommes y resta un instant avant de se redresser pour tirer l’épée. Son adversaire aux armes vermeilles sauta à bas de son cheval de guerre et se rua sur le roi des hommes ; sur ce terrain nul n’avait jamais rivalisé avec le Géant des Iles et cependant Edenar fit preuve d’une adresse d’un autre monde…A maintes reprises il aurai pu asséner un coup à son adversaire mais s’en garda bien, Ydrin devina alors pourquoi Edenar ne l’emporterai pas : il n’avait nulle volonté de nuire au roi des îles. Ce dernier n’en avait pas autant à sa décharge et finit bien par un large coup à faucher son adversaire, la lame déchira le haubert d’Edenar et lui pénétra le flanc en répandant son sang.

Du haut de la colline Ydrin vit que le destin d’Edenar tel que commandé par les puissances venait à s’achever, il ne put se résigner à voir massacrer le meilleur des chevalier qu’il eu jamais rencontré. Le chevalier aux armes bleues siffla et son compagnon de route arriva aussitôt, il l’enfourcha et partit sans lance ni bouclier, il galopa tel le vent dans la lande et vînt arrêter la lame du Géant des Iles avant qu’elle ne porte le coup fatal. Ydrin n’était que fureur malgré le fait qu’il aima beaucoup le roi des géants, il sauta donc à bas de sa monture pour s’interposer.

 

« Il ne s’appelle pas chevalier celui qui ose frapper un homme à terre ! Si vous voulez tant vous battre roi des îles alors vous allez être battu ! »

 

Le Géant fut abasourdi par les mots de l’impudent chevalier aux armes bleues, dans la fureur il déploya une force et une colère dont les hommes ont depuis bien longtemps oublié l’ampleur, égale à celle de la mer en furie. Les coups s’enchaînèrent et les tours d’épée les plus habiles furent échangés, mais aucun ne pouvait surprendre Ydrin qui les avaient maîtrisés dès son jeune âge, il les para et finit par enrober la lame de son opposant avant de la faire voler loin de sa main pourtant forte comme la pierre. Arrêtant son épée près du gorgerin du roi des Géants il s’exclama avec colère.

 

« Criez merci ou par les puissances je jetterai le deuil sur votre royaume pourtant mille fois béni. »

 

Le Géant des Iles n’avait de faiblesse que le souci de ses gens et fit ainsi qu’il lui était demandé, or à genoux il dépassait toujours d’une bonne tête son vainqueur.

 

« Priez votre meilleur médecin de venir sur le champ prendre soin du roi des hommes car si il meurt il pourrai vous en coûter à vous comme à tous ceux qui portent les armes sous vos couleurs ! »

 

Et un géant qui avait lui aussi appris des plantes avec la sorcière du sud arriva, il officia tant que dura le jour et alors que des torches avaient été amenées près de lui Ydrin tenait toujours son épée au cou du Géant des Iles , puis le médecin parla en ces termes.

 

« Edenar roi des hommes vivra mais plus jamais il ne montera un cheval ni ne portera les armes. »

 

On fit porter Edenar sur une civière jusque sous la tente royale, Ydrin daigna alors remettre son épée au fourreau.

 

« Vous avez la paix à présent roi des îles, veillez surtout à bien la conserver. »

 

Mais le Géant des Iles s’il s’était calmé ne pouvait que s’interroger sur ce chevalier qui avait déjoué tous ses tours guerriers jusqu’aux plus secrets.

 

«Dis moi quel est le nom de mon vainqueur chevalier ? »

 

« En vérité c’est la sagesse d’Edenar, meilleur chevalier du peuple des hommes qui vous a vaincu car si ce n’était pour me montrer digne de lui je n’aurai jamais osé lever les armes contre vous. »

 

La réponse plongea le Géant dans le perplexité, il ôta son heaume serti d’une couronne de corail vermeil et à la lueur des torches marcha vers le vaillant chevalier aux armes bleues.

 

« Je n’entends que la moitié de ce tu me dis chevalier, ne pourrai tu me révéler simplement ton nom ? »

 

Ydrin secoua la tête et alors qu’il s’en retournait vers la tente du roi Edenar, mais il répondit tout de même ceci.

 

« Je ne pourrai vous révéler mon nom que si vous faîtes serment d’allégeance au roi Edenar et que lui-même désire toujours le connaître. »

 

Il n’en fallut pas plus au Géant pour qu’il désire ardemment savoir le fin mot de cette étrange histoire, il retourna chez ses gens et se fit désarmer puis s’habilla comme il sied à un roi qui en visite un autre, après quoi il rejoignit à son tour la tente d’Edenar du Royaume de l’Est. Ce dernier s’était enfin éveillé de son escapade vers le royaume des morts, il fut rapidement mis au fait du prodige du chevalier aux armes bleues que tous les chevaliers de la cour tenaient à présent pour le meilleur d’entre eux ; mais Ydrin ne désirait pas être fêté et toujours vêtu de ses armes se tenait au chevet du roi des hommes, ce dernier lui parla alors que le Géant des Iles faisait son entrée.

 

« Vous faîtes triste figure sire Ydrin alors que vous voilà devenu le meilleur chevalier du peuple des hommes, il n’y a pourtant nulle raison de s’apitoyer, il existe un moment où tout chevalier doit devenir un roi…Peut-être deviendrais-je alors le meilleur d’entre eux non pour mes faits d’armes mais pour la paix que j’aurai su apporter à mes gens. »

 

Le Géant des Iles trouvait beaucoup de sagesse dans ces mots et fut fort attristé de la peine dans laquelle il avait plongé Edenar, il s’agenouilla au chevet de l’homme.

 

« Vous êtes fort sage roi Edenar et vos chevaliers ont prouvé sur le champ qu’ils étaient les meilleurs, je réalise maintenant que c’est folie de m’en être pris à vous car vous ne pouvez pas être celui qui m’a causé du tort. Je serai votre vassal en toutes choses si cela peut excuser un peu du malheur que je vous ai causé. »

 

Edenar fut surpris par l’humilité et l’amitié sincère qu’il lut à cet instant dans le regard du fier roi des îles.

 

« Il est de coutume roi des îles que ce soit le suzerain et non le vassal qui accorde un vœu lors du serment, dis moi en quoi je puis te contenter. »

 

La tente résonna alors du rire puissant du roi des îles, un rire qui était si pur à l’image du feu qu’il apportait le bonheur et réchauffait les cœurs, un tel rire on ne l’avait plus entendu depuis le départ d’Ydrin dans le royaume des îles.

 

« Alors je vais vous faire une requête qui saura tous deux nous satisfaire bon roi, je vous demande à présent qu’Ydrin est libre de son serment envers moi de nous révéler à tous deux quel est son lignage. »

 

Le roi Edenar était lui-même très curieux d’en savoir plus et accorda avec hâte le vœu du Géant des Iles, Ydrin enleva alors son heaume et s’inclina devant les deux plus grands rois dont les pieds eurent jamais foulé la terre.

 

« Je vis le jour dans le beau royaume des îles et ma mère était Ulinor aux Cheveux d’Or, elle-même fille de Drewen le Roux qui est le cousin du seigneur qui protège ce royaume mille fois béni au-delà des mers. Mais de mon père hélas je ne sais rien mes seigneurs. »

 

Un silence terrible régna alors dans l’instant qui suivit, de la fidélité d’Ulinor il ne pouvait être soulevée la question, pas plus que de la provenance de cheveux noirs corbeau pourtant étrangers à une lignée de blonds et de roux.  Le Géant des Iles se releva et posa sa main affectueuse sur l’épaule du petit géant.

 

« Vous êtes chacun l’un pour l’autre tout ce qui reste de votre famille, à présent je le vois bien Ydrin tu ne peux descendre que du lignage qui porta le meilleur chevalier du peuple des hommes…Comme il est triste que nous ne puissions pas avoir été réunis plus tôt alors que la gracieuse Ulinor aux cheveux d’or arpentait encore ces terres. »

 

Ce furent beaucoup d’émotions pour peu de temps tant il fallu fêter des retrouvailles et faire un deuil à la fois, malgré tout la paix régnait à présent entre le royaume de l’Est et le royaume des îles…Une paix qui au caprice des puissances n’aurai su durer.

Page vue 53 fois, créée le 05.09.2007 23h10 par guinch
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