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Sitting ducks

Le camion ralentit et s’arrêta devant la barrière où la sentinelle de faction s’approcha du côté conducteur, l’arrivant produisit son identification et le marine le salua.

 

_Bienvenue à Quantico, sergent major !

_ Ca faisait un bail, fils. L’armurerie est toujours au même endroit ?

_ Affirmatif, sergent.

_ Merci marine.

 

La barrière se leva et le camion s’engouffra vers le parking dans le bruit de ses énormes échappements. La base des marines de Quantico abritait tout ce que le Corps comptait d’unités spéciales, Simon Pelles avait été basé, du moins sur le papier, à Quantico durant de nombreuses années au sein du premier détachement de Force Reconnaissance. Il signa le registre puis fila se changer au vestiaire ; enfiler les allées de la base, même de nuit, lui rappelait un fouillis de souvenirs, entassés pêle-mêle comme une pile de pancakes étouffants que l’on aurait noyés avec de la marmelade d’oranges amères.

 

La silhouette de Scope sortit du bâtiment abritant l’armurerie, même de nuit il trouvait encore le moyen de porter son éternel chapeau scout. Simon s’arrêta pour le regarder de pied en cape, sifflant de façon admirative.

 

_ Tu as fini par le prendre ce fichu galon.

_ Salut, sarge.

_ Salut, Scope.

 

Les deux sergents majors entrèrent dans le bâtiment, passant un point de reconnaissance biométrique avant de pouvoir accéder à l’atelier de l’armurerie.

 

_ Ca n’a pas beaucoup changé je vois, c’est toujours le bordel ici.

_ C’est ça, MON armurerie est une véritable horloge Suisse mon pote ; ça tourne au poil, c’est précis et c’est sûr.

_ Je veux bien te croire Scope, bon venons en au fait, tu as ce que je t’ai demandé ?

_ Quelle blague, guns are us ! Amènes-toi par ici.

 

Scope s’empara d’une caisse blindée noire siglée Ares Firearms, détonnant parmi ses sœurs peintes en vert olive ; il la posa à plat sur un établi, puis l’ouvrit, assemblant les parties de l’arme.

 

_ M10A2, la bête n’a pas changée depuis l’époque par ce que c’est toujours le bon dieu de meilleur fusil de sa catégorie.

_ Pas la peine de me le vendre, je l’ai déjà acheté ; ce que je veux, c’est que tu m’apprennes à m’en servir.

_ Un petit « merci Scope pour avoir changé mon banal SWS en merveille made in Quantico » aurait suffi ; enfin, à partir de maintenant, hors de question de t’entraîner sur autre chose que TON fusil, sinon autant pisser dans un violon pour jouer du classique.

_ Je connais mon credo, ceci est mon fusil… Scope, on a pas finis en très bon termes alors je ne serai pas venu te demander ce service si je comptais jouer au touriste ou au chasseur du dimanche.

_ C’est pas pour tirer le cerf, donc.

_ On utilise pas un bazooka pour écraser une mouche.

_ Tu veux rien me dire, c’est ça ?

_ Je veux t’éviter les dilemmes moraux, si tu vois ce que je veux dire.

 

La remarque mit fin à la discussion, bien sûr Scope savait à quoi Driver faisait référence, il l’avait lâché une fois et c’était le moment de régler la note. Scope enleva son fichu chapeau  et le plia pour le fourrer dans sa poche, il s’était sérieusement dégarni avec les années.

 

_ Tu tiens la forme sarge ?

_ Ca dépend, tu penses à quoi ?

_ Petite chasse au canard sur le coup de quatre zéro zéro, j’ai déjà prévenu Powell, c’est le juteux des aspirants ; il met à notre disposition ses candidats à intégrer Force Recon. Tu penses que tu rentrera encore dans une peau de requin ? On dirait que t’as pris du bide.

_ Petit con, je te collerai une branlée avec une main dans le dos si je le voulais ; sors les peaux, on va chasser.

_ Moi qui avais peur que tu sois devenu mou et sentimental en vieillissant, Pelles.

_ Ta mémoire fout le camp on dirait, mon nom c’est sergent.

 

Les deux sous officiers quittèrent l’armurerie pour aller se changer.

 

  

  • 11 Mai 2055
  • 04 :00 Heure Locale
  • Baraquement des Aspirants, Base des Marines de Quantico, Terre.

 

La porte s’ouvrit en fracas alors que le sergent artilleur Alan Powell soufflait dans son sifflet, tirant d’un sommeil épuisé les aspirants du programme.

 

_ MARINES ! Branle bas de combat ! La base vient de faire l’objet de tirs ennemis ; nous estimons qu’un groupe de tireurs embusqués se trouve en dehors de notre périmètre ; mission recherche et destruction !

 

Invisibles dans leurs combinaisons camouflées, les deux snipers observaient la scène à travers leur optronique non sans un certain amusement, il étaient passés aux aussi par le traitement de choc qui devait séparer ceux baissant les bras, de ceux qui intégreraient Force Reconnaissance.

 

_ Coin, coin.

_ J’ai pas le souvenir que tu ai tellement fait le malin à l’époque, Scope.

_ Il faut bien que le grand âge ait ses privilèges, fais moi plaisir, shoote Powell, il me doit vingt dollars depuis notre dernière partie de poker.

 

Simon récupéra son arme sur le côté et déplia le bipied, puis il cala la crosse préalablement réglée sur son épaule, la lunette s’ajusta automatiquement sur la cible, il avait quasiment l’impression que le fusil était vivant…

 

_ Il n’y a vraiment aucun réglage à faire sur ce truc.

_ Si, ne te fies pas au logiciel de prévision du mouvement, tires au jugé.

 

Le petit disque prévoyant le cône meurtrier un peu en avant du sens du mouvement de la cible, disparut d’une simple pression du doigt sur un des nombreux boutons placés près du ponté. Simon respira plus lentement, plus amplement.

 

_ Distance au but, six cent dix huit mètres, obstacle grillagé ; vent nord nord-ouest trente kilomètres heure.

_ Munition AP, Check.

_ Chargé et prêt à tirer.

 

Le moment était venu, la prise sur l’arme se fit plus ferme, dès que Scope murmura sur la fréquence, Simon bloqua sa respiration.

 

_ Feu, feu, feu.

 

Le flash creva la nuit à la troisième injonction, bien que grandement atténué par les suppresseur du fusil ; le bruit, lui, fut complètement écrasé par l’émetteur de bruit blanc. Malgré l’élancement de son épaule, Simon devait admettre qu’il était impressionné ; la douille de la munition 5.56 d’entraînement fut directement collectée par le système de l’arme, le tireur pouvait vraiment rester collé sur sa cible… Powell aurait un sacré bleu aux fesses demain matin, devant le baraquement c’était la panique.

 

_ Joli tir, on bouge.

 

Les deux snipers rampèrent lentement en arrière, se fondant dans la végétation du terrain d’entraînement. Pelles commençait à comprendre un peu mieux pourquoi des types comme Scope ou la Sentence prenaient leur pied en faisant ce job.

Page vue 54 fois, créée le 05.09.2007 00h37 par guinch
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