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BLACKOPS

La réparation de son épaule gauche était encore très fragile, il s’assit dans le siège opérateur avec une grimace, la douleur irradiant plein pot. Sergueï Ivanovitch  le regardait, inquiet tout en calibrant la nouvelle interface de l’ordinateur de l’APC N°5.

 

_ Pour que ça fonctionne correctement, il faut que tes sensations ne soient atténuées par aucun anti-douleur.

_ Expliques moi à nouveau, ça se connecte comme mon monitoring ?

_ Tu enfonces les ports de communication de l’interface, dans la membrane de maintenance de ta colonne vertébrale ; les nanites qui servent à acheminer les informations neurales de tes prothèses peuvent traiter toutes sortes de stimuli, c’est juste une question de protocole de communication.

_ Ca va être comme la simulation neurale dans les cinémas, donc.

_ A peu près, beaucoup de contrôleurs du centre des opérations utilisent ces interfaces ; les pilotes de chasse ou de sports mécaniques se font volontairement greffer des interfaces neurales.

_ Des barges, je me passerai bien de ce truc.

_ J’aimerai aussi que tu t’en passes Simon Josephovitch ; dans ton état cela te permettra de superviser ton équipe, mais ne peux tu pas laisser cette tâche à un autre, en attendant d’être guéri ? Tout le monde le fait, tu n’es pas irremplaçable, en fait tu es un des superviseurs avec le moins d’expérience.

_ Le problème n’est pas là Sergueï.

 

« Non, le problème c’est qu’on ne sait plus à qui on peut faire confiance au sein de la compagnie. »

 

Reinhardt avait regagné un semblant d’espoir, suite au tuyau concernant la Nouvelle Orléans ; ils tenaient un fil menant au commanditaire du tueur. D’après Ganja, Tony le Tigre avait évoqué une certaine « Mademoiselle », un trafiquant d’armes concurrent de Bernard l’Amoureux, cela commençait à avoir du sens… Surtout si elle était approvisionnée en armes chinoises par des généraux belliqueux, eux même opposés à l’ouverture de négociations entre les Etats-Unis d’Amérique et la République Populaire de Chine. L’histoire cadrait parfaitement, Ayao pouvait avoir noué des contacts avec ce trafiquant d’armes durant sa période africaine, et lui offrait à présent une place à San Drad dans le cadre d’un marché occulte existant entre eux.

 

Pour étayer cette théorie, il faudrait pouvoir capturer le ravisseur de Martin Forrester et obtenir son témoignage, ou bien une preuve le liant à Tony le Tigre ; ensuite Rémi Lebeau pourrait entrer en scène et Reinhardt présenter le résultat de ses investigations devant la maison mère de Stockholm. Tout reposait sur les épaules du SWAT-5.

 

Mais cela ne réglait que le volet privé de l’affaire, pour une raison inconnue, Reinhardt ne voulait pas de l’assistance des service gouvernementaux américains ; pourtant s’il existait un lien entre l’attentat de Genève et l’association d’Aayo Hiroshi avec la mystérieuse « Mademoiselle », cela les intéresserait au plus haut point.

Simon ne roulait pas pour Herbert Reinhardt, à vrai dire, il ne pouvait pas l’encadrer ; une fois connecté, il regarda Sergueï.

 

_ J’ai besoin de me concentrer pour utiliser ce machin, tu peux me laisser un moment et fermer la porte ?

_ Bien sûr, tu m’appelles si tu as besoin de quelque chose.

 

Simon ferma les yeux et manqua d’arrêter de respirer en voyant s’afficher des myriades de couleurs derrière ses paupières closes ; puis vinrent des démangeaisons, des picotements tout le long de prolongements de son corps qui parfois n’existaient même pas… C’était simplement déroutant. L’interface se stabilisa et il essaya d’ordonner sa conception du système comme sa console à l’ancienne. Au bout de trois essais infructueux, il parvînt à sélectionner l’écran des communications extérieures. Il avait besoin de faire remonter ses informations très vite, SOCOM était en relation avec les services de renseignement ; il chercha la liaison sans fil avec son ordinateur bracelet et importa la fiche contact du colonel Fargo ; à Quantico il devait être bientôt sept heures.

 

_ Lieutenant Colonel Fargo, j’écoute.

_ Bonjour mon colonel, sergent major Pelles au téléphone.

_ Votre voix est un peu distordue sarge, vous me recevez bien ?

 

Simon se força à ouvrir les yeux, sa tête tournait et ses muscles ne semblaient vouloir répondre qu’avec une lenteur inhabituelle ; enfin il parvînt à forcer sa mâchoire à entrer en mouvement, et utiliser le micro plutôt que… Ce qu’il avait instinctivement fait.

 

_ Excusez-moi monsieur, une nouvelle interface que je ne maîtrise pas.

_ Vous avez néanmoins l’air dans le coletard, sarge.

_ Une sale nuit monsieur, et elle est loin d’être finie.

_ Ca s’entend mon vieux ; alors, qu’est-ce que je peux faire pour vous ?

_ J’ai des informations concernant l’attentat de Genève, que je dois faire remonter en urgence au renseignement.

_ Ce n’est pas très régulier, vous devriez passer par votre officier commandant actuel ou bien vous rendre au bâtiment fédéral le plus proche.

_ Un certain jeune lieutenant m’a dit une fois, que pour gagner, il fallait parfois tordre les règles à son avantage.

_ D’accord, de toute façon je doute que le pentagone reproche sa célérité à notre héros du moment…

 

Les nouvelles voyageaient vite dans la fraternité des marines ; Simon soupira, exténué, et se força à continuer.

 

_ Enregistrez bien ce que je vais vous dire.

_ Allez-y sarge.

_ Le directeur des opérations de la Securitas à San Drad soupçonne le directeur de la branche américaine, Ayao Hiroshi, d’être en collusion avec un marchand d’armes international à la solde des généraux chinois. La faille de sécurité de Genève découlerait de cette entente. La théorie du directeur Reinhardt semble crédible, son fils ayant été enlevé il y a quelques heures ; il semble que les kidnappeurs aient eu connaissance des détails de sa sécurité rapprochée. Le marchand d’armes est surnommé « Mademoiselle », elle est passé par l’intermédiaire d’un mafieux de la Nouvelle Orléans nommé Tony le Tigre pour organiser l’enlèvement ; nous montons actuellement une opération de secours, pour libérer l’otage et capturer ses ravisseurs. C’est tout ce que je sais pour le moment.

_ C’est bien enregistré, je fais parvenir ça rapidement à un de mes contacts de Langley… Pourquoi ces informations n’ont elles pas été transmises au FBI et à l’ATF ? Ce sont les services compétents dans cette affaire.

_ Je pense que Reinhardt s’attendait à ce que je communique ces informations au gouvernement américain, comme je l’ai fait à Genève ; c’est juste qu’ainsi, sa loyauté envers la compagnie ne peut être remise en cause ; et si quelque chose dérape, ce sera tout pour ma pomme.

_ Alors vous êtes un bon con, sergent major.

_ Ca ne fait plus l’ombre d’un doute, depuis le temps ; mais ce n’est pas comme si j’avais le choix, je connais mes devoirs.

_ Vous avez besoin d’autre chose ?

_ Oui, l’info sur Tony.T vient d’un ancien de chez nous, Rémi Lebeau, détective aux mœurs du NOPD ; si on pouvait dire à leurs gars des affaires internes de lui lâcher la grappe, ce serait bien.

_ Je ne vous promet rien.

_ Il faut que j’y aille, merci mon colonel.

_ Surveillez vos arrières sarge.

 

Simon fit pivoter son siège, rétractant les aiguilles enfoncées dans le port de maintenance à la base de son dos ; puis il essaya d’ouvrir le panneau d’accès latéral du blindé sans se faire mal. Sortant du vestiaire, les agents du SWAT-5 étaient prêts et équipés, Mike, son casque sous le bras, regardait Simon bouger péniblement, avec une désapprobation affichée sur son visage.

 

_ Tu ne t’arrêtera que quand tu sera mort, décidément.

_ Je suis un marine, pas un matelot ; chez nous Mike, on s’arrête pas de se battre par ce qu’on s’est cassé un ongle.

_ Je ne pense pas que Becky approuverait.

_ Pas plus que quand ce sauvage lui a tranché la gorge.

_ Qu’est-ce que tu veux, le flinguer toi-même ?

_ Non, mais j’espère bien avoir l’occasion de lui filer une branlée de première en salle d’interrogatoire ; il aura plus besoin d’un soigneur que d’un avocat quand j’en aurai fini avec lui.

_ Ok, c’est toi le chef Wyatt Earp ; mais on s’apprête à enfreindre la loi, là.

_ Vous avez tous signé une clause de non divulgation, nous avons le go du DIROPS ; notre source d’information est fiable, je veux ce type vivant… En voiture les filles, ET PLUS VITE QUE CA !

 

Les agents grimpèrent dans l’APC et Simon referma la porte avant de se boucler dans son siège… La douleur le transperça de bas en haut comme une aiguille géante, et soudain, son esprit glissa à nouveau vers l’ordinateur et le flot de données émanant des équipements de ses agents ; d’une pensée il visualisa le tarmac privé des véhicules d’urgence, le lourd moteur à hydrogène s’alluma, puis les phares, et enfin, le véhicule s’engagea tout seul sur la rampe de sortie. François Niangba jeta un regard inquiet à son chef d’unité.

 

_ Merde, c’est effrayant quand il fait ça.

 

La voix de Simon aux sonorités électroniques répondit sur la fréquence de l’unité, sans que ses lèvres ne bougent.

 

_ Je peux vous entendre, là.

_ Toutes mes excuses patron, rassures-moi, ce n’est pas toi qui pilotera le VTOL ?

_ Ca dépend, vous tenez tant que ça à finir aplatis comme des pancakes ?

 

Mike commenta tout en continuant à vérifier les images de surveillance satellite sur son projecteur tactique trois points.

 

_ C’est qu’il lui reste au moins un gramme de bon sens, je serai presque rassuré pour le coup.

 

Le transport de troupes ralentit et se glissa en marche arrière dans la soute d’un massif appareil de largage VTOL couleur noir de nuit… S’arrachant avec peine du tarmac grâce à ses puissants propulseurs, l’appareil vira doucement puis effectua une transition entre ses propulseurs de manœuvre, et les réacteurs qui déchirèrent la nuit de leurs flammes de sortie… Quelques secondes plus tard, les feux de position de la navette avaient disparus dans la nuit, en direction de l’est et de la Nouvelle Orléans.
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