Impossible de retourner au Whisper, de toute façon Kurt ne voulait pas prendre le risque d’amener les flics jusqu’à son employeur… Il devait considérer que des mouchards locaux vendraient la position de sa planque au port, il ne fallait donc pas y retourner ; tous les accès menant hors de San Drad étaient surveillés, aucun endroit familier n’était sûr, aucun contact non plus.
Kurt devait être là où on ne l’attendait pas, garder l’initiative, et pour ça il aurait besoin d’armes… Il savait où il pouvait en trouver, ainsi que des réponses à ses questions ; Jimmy Dee l’avait piégé, l’avait vendu aux flics.
Kurt pénétra dans le chantier, il était plus facile de neutraliser l’électronique de surveillance que les vigiles de jadis, qu’elle avait remplacés. C’était Noël, il y avait là tout ce dont il avait besoin pour envoyer un message clair aux gangs de San Drad, personne ne baise Bernard l’Amoureux et les gens qui bossent pour lui.
S’attaquant aux casiers des ouvriers, le fugitif se coupa les cheveux très court et changea de vêtements, ça n’abuserait pas les logiciels de reconnaissance faciale mais de loin cela ferait l’affaire ; de toute façon, Kurt n’avait besoin que d’assez de temps pour se rendre au centre commercial de Watts, après il agirait en conséquence de ce que lui apprendrait ce bon vieux Jimmy.
Jimmy Dee réfléchissait justement à ce que lui avait dit un jour le marchand d’armes, il était entré dans la cour des grands… Et il s’était fait baiser en beauté. Depuis que ses nouveaux « amis » avaient débarqué, Jimmy se retrouvait coincé dans une planque, il n’avait rien gagné du territoire qu’il espérait s’approprier avec les armes qu’il avait achetées ; et voilà que maintenant son contact lui avait fait balancer involontairement un gars très dangereux… Les infos disaient que les flics avaient des morts et que le marchand d’armes s’était échappé, ils avaient fait le lien avec les quatre flics morts sur le parking ; c’était un putain de coup monté, et voilà que le responsable, le gars à la queue de cheval et au fusil, ne répondait plus au numéro qu’il lui avait filé. Quand ses gars lui annoncèrent que le fugitif frappait à sa porte, Jimmy Dee sentit que la chance l’avait définitivement abandonné.
Le gars avait un pistolet mitrailleur et un couteau sur lui, ils les avait filés sans rechigner au frère de l’entrée ; Jimmy était flippé, il avait son flingue en main.
_ Qu’est-ce que tu veux, mec ?
_ Des explications Jimmy Dee, je te donne une chance de t’expliquer avant que mon patron ne décide de vous effacer de la surface de la Terre, toi et ton gang.
_ Qu’il vienne, putain on est armés jusqu’aux dents et cet endroit est une véritable forteresse !
_ Tu as une dernière chance de t’expliquer Jimmy, que faisaient les flics au rendez-vous que tu m’as donné ?
_ Ca me coûte rien de te le dire, mec ; c’est l’autre blanc qui m’a demandé de t’appeler, ça doit être lui qui a rencardé les flics.
_ Qui c’est ce blanc ?
_ Je sais pas, il a dit qu’il représentait le yakusa, qu’il voulait que les Hell’s de Venice crèvent la gueule ouverte ; il m’a filé un gros tas de fric pour acheter des armes et j’ai pas posé plus de questions.
_ Où je peux le trouver ?
_ Je suis pas sa secrétaire, maintenant casse-toi !
_ Tu passe pourtant bien des coups de fil pour lui, tu veux qu’on raconte partout que Jimmy Dee est la pute d’un blanc ?
_ Qu’est-ce que tu as dit ? Si je défonce ta petite gueule, personne ne dira quoi que ce soit.
_ Jimmy, tu sais quel est le problème des forteresses ?
_ Qu’est-ce que tu racontes, mec ? Je vais te crever et…
_ Tu ne vas pas me crever parce que sinon, personne ne sortira vivant d’ici. Le problème des forteresses Jimmy, c’est qu’une fois bien retranché à l’intérieur, il est très difficile d’en sortir.
Jimmy ne se souvenait que trop bien du coup des mitrailleuses automatiques que lui avait fait le marchand d’armes, il avait ce même air menaçant du type qui n’a pas besoin d’un flingue par ce qu’il a caché une bombe nucléaire dans son caleçon.
_ Jimmy, tu vas me dire en détail tout ce que tu sais de ton émissaire yakuza, et pendant ce temps, je vais faire un peu de shopping dans vos réserves… Vois ça comme un début de remboursement de la dette énorme que tu as envers mon patron.
Jimmy Dee baissa son arme, avec un soupir las.
_ Putain… C’était quoi ce coup-ci ?
_ Des explosifs Jimmy, assez pour envoyer ta forteresse en orbite.