L’escadre détachée suite à l’appel de détresse émis par l’USS Detroit capta le message d’avertissement de la force de résistance 237 lors d’une de ses abattées d’écoute et détection, l’IA menant l’escadre maintînt sa position et réveilla les équipages. L’officier commandant la mission décida de transmettre les informations et ses nouveaux ordres au QG du secteur avant de changer de tactique ; il contournerait New Boston hors de portée de détection avant de placer son escadre entre la planète et les routes probables d’arrivée des bâtiments chinois, ainsi il couperait l’arrivée de renforts supplémentaires et laisserait les forces déjà en présence pour d’autres bâtiments que détacherait le QG.
La tactique paya, quatre mois plus tard, le torpilleur et le transporteur tactique chinois en orbite de New Boston furent détruits par le reste de la troisième flotte ; l’escadre de secours subit de lourds dommages mais détruisit deux bâtiments de renfort chinois et mirent le dernier en déroute avant interception. New Boston fut libérée en l’affaire de douze heures, et la population locale l’apprit en direct sur Duke FM.
Durant les six mois que durèrent sa période de résistance, la Force 237 perdit seulement huit hommes, dont cinq lors de la libération de New Boston où elle combattit en première ligne pour sauvegarder l’exploitation minière de Vector Corporation. Le général de brigade Earl Brickman de l’US Army se déplaça personnellement jusqu’à l’exploitation pour passer en revue la 237 ; c’est de lui que provient le nom officieux du cinquième peloton, ayant vu ces soldats dépenaillés mais déterminés et armés en majorité d’équipements ennemis, il déclara :
«Ces irlandais et ces jarheads ont la ténacité du chacal, ma parole!»
Durant les jours qui suivirent, le 5ème marine mobile et le 2ème reconnaissance des Irish guards furent relevés par l’armée, ils bénéficièrent d’une courte semaine pour se préparer à embarquer sur les transports à destination de la base de Saratoga ; ayant combattu et vécu ensemble pendant de longs mois, il en découla des amitiés solides.
Dans une alcôve, un tout nouveau projecteur trois points faisait sensation ; quasiment tous les clients du bar s’arrêtaient pour contempler le groupe de rock qui jouait sans pour autant être là. Simon Pelles triturait un bol de cacahouètes grillées, arrimé au comptoir.
_ Vous avez vu ça sergent ? Quand on reviendra de notre prochain déploiement, tous les gens auront des voitures qui volent sur Terre.
_ Possible Yablonski, et ils auront sûrement l’air très cons quand leur belle voiture qui vole tombera en panne en plein ciel, non ?
_ Vous n’avez aucun sens du merveilleux Gunny.
_ Pas ma faute marine ; pour moi une douche, de la bouffe chaude et un vrai lit, c’est merveilleux.
_ Vous avez raison là-dessus, je ne suis pas mécontent d’en avoir fini avec notre séjour camping sur New Boston.
_ Je te laisse Barbecue, je vois nos invités qui arrivent.
Le sergent glissa au bas de son tabouret et rejoint les militaires irlandais qui entraient au Bloody Living, le bar réservé aux hommes du rang et aux sous-officiers.
_ Alors, vos ordres sont tombés ?
La troupe se dispersa dans le bar, retrouvant le reste des marines qui avaient servi avec eux sur 237, le sergent chef O’Reilly passa son béret sous son épaulette droite.
_ Retour chez nous, on va toucher un nouvel officier et retrouver le reste du bataillon ; départ demain à seize zéro zéro.
_ Veinards ; notre bien aimé Etat Major nous a déjà trouvé un nouveau rafiot, encore plus pourri que le précédent, et on repart au charbon vers Eta-Eridani dans deux jours.
_ C’est chaud comme secteur ?
_ Il paraît.
_ Vous ferez attention ?
_ Ca devrait être facile, tant qu’on ne doit pas baby-sitter des touristes Irlandais…
O’Reilly plaça un coup de poing sur le bras de son collègue américain, le temps des frictions entre les gardes et les marines était loin derrière eux ; tout n’était plus que plaisanterie.
_ Allons boire un verre, j’aurai espéré que vous m’évitiez le couplet peau de vache pour cette dernière soirée, Pelles.
_ J’ai une réputation à défendre ; mais je vous assure que si nous avions été seuls, vous auriez eu affaire à un parfait gentleman.
_ Je n’attire pas ces types-là, c’est un peu l’histoire de ma vie.
_ Vous cherchez au mauvais endroit, Mary-Kate ; l’armée n’est pas connue pour former des poètes.
La soirée fut très réussie, on évita le drame d’un karaoké, mais tous le monde toucha d’une façon ou d’une autre l’état de grâce appelé ébriété ; Simon redoutait à présent de devoir se lever de sa chaise… Assis face à un whisky et à une femme dont la résistance à l’alcool semblait défier les lois de la physique, le marine se sentait de moins en moins frais.
_ Et celui-là c’est Richard ; l’avant-dernier… Richard était dessinateur, ce sombre connard a profité d’une semaine où j’étais en manœuvres pour se tirer avec l’omni-home, le canapé et mes disques.
_ A-t-on jamais retrouvé le corps de Richard ?
_ Non, pourtant mes frères l’ont cherché…
_ Combien ?
_ Quoi ?
_ Combien de frères ?
_ Deux, Liam et Mickey ; respectivement mon aîné de… euh… 6 ans et l’autre cadet de 2 ans. Tu en as toi ?
_ Non, fils unique.
_ Ceci explique cela, tu as été trop aimé, c’est pour ça que tu ne sais pas donner, Pelles.
_ Oh pitié ! Ma mère était une perle, mais du moment où j’ai eu des idées différentes de celles de mon vieux, j’ai cessé de l’amuser celui-là… je t’ai parlé de Becky ?
_ C’est qui ça ?
_ La fille qui m’a plaquée avant que je parte aux States et que je m’engage.
_ Je parierai ma chemise que c’était une salope !
_ Pire, une anglaise.
_ Bois ton verre, Pelles. Tu triches !
_ Je suis bourré, si j’avale une goutte de plus, je vais me conduire comme un collégien après sa première bière.
_ Avoue que ça pourrait être marrant.
_ Tu sais ce que j’aimerai vraiment?
Mary-Kate lui lança un regard pétillant.
_ Vas-y, dis moi.
_ Des chips au vinaigre, comme à la maison.
Le sourire de l'Irlandaise s'élargit.
_ Et de la stout?
_ Oh oui, ce serait juste parfait.
_ Et on danserait ?
_ Si tu veux… eh, il y a Richard qui a pris feu!
_ C’est tout ce qu’il mérite, Richard.
_ J’ai jamais compris ce que vous autres les nanas trouviez de si important à avoir des photos dans votre portefeuille… Merde on est au vingt et unième siècle, on a des puces glissées sous la peau pour payer et tu te trimballes encore avec un portefeuille énorme !
_ Tu as essayé de brûler ou d’écraser une photo stockée sur ton PDA sans abîmer la bête, monsieur je sais tout ?
_ Je suis OR-8, je sais donc forcément mieux que toi, qui n’es encore qu’OR-7, comment fonctionne la vie… D’ailleurs, je n’ai pas de photos sur mon PDA, comme ça, j’évite les accidents.
_ Ta vie doit être terriblement triste sergent artilleur fils unique.
_ On va danser, tu vas voir si je suis un type triste…
_ Encore une feinte pour ne pas boire ton verre, sois un homme !
Simon contempla le verre un moment, puis grimaçant, se leva en l’abandonnant sur la table ; son sens de l’équilibre déjà gravement altéré, lui confirma qu’il avait fait le bon choix.
_ Je suis responsable de ces petits cons, à partir de maintenant il faut que je dessaoule pour m’assurer qu’ils ne s’attirent pas d’ennuis.
_ Oh, la belle et bonne excuse.
_ Sergent chef O’Reilly, je n’ai pas tes facilités génétiques pour pallier à une absence de sens commun ; alors je te le répète, je suis fait ma vieille… Il faut que je mange un truc et que je me passe la tête sous l’eau froide.
_ Je t’accompagne.
Simon passa son bras autour des épaules d’O’Reilly.
_ C’est terriblement romantique, pas vrai ?
_ Grandiose… Devoir saouler un mec pour le lever, c’est la gloire Pelles ; merci bien.
_ Sois patiente rouquine ; dans une heure à tout casser, je serai clean.
_ Cinquante de vos billets verts que dans une heure, tu dors.
_ Tenu.
Les deux sergents sortirent du bar, et aujourd'hui encore les paris concernant ce qui arriva entre eux par la suite, courrent toujours... Toute personne disposant d'une preuve peut se présenter au O'Flaherty's pub sur New Boston pour empocher ses gains.