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Profits>Pertes humaines=Bonne journée de travail

  • Laboratoire Avalon-L4X , Livingstone-4
  • 7 Août 2037
  • 18:38 Heure Locale

La jungle s’arrête et le sol sur sa frontière a été noirci par les flammes ; derrière ses clotûres électriques aux sommets barbelés, le laboratoire de la compagnie Avalon s’agrippe comme une vigne de métal au flanc de la montagne. Immobiles, invisibles ; les marines du détachement un observent la scène ; le ciel est lourdement chargé de nuages de pluie, une tempête approche.

_ Lieutenant, il y a une épave de camion plus haut sur la piste ; on dirait qu’il s’est fait prendre dans une embuscade en règle, on a tout un tas de douilles, calibre 7.26, des munitions explosives de fabrication russe je dirai. Pas de cadavres.
_ Ils sont ici vos cadavres, sergent ; on dirait que les miliciens locaux les ont traînés pour les exposer sous les fenêtres des gars d’Avalon. Sarge, prenez Gunner avec vous pour garder la piste ; Scope, surveille l’entrée ; le reste du groupe, avec moi.

Les formes camouflées sortirent de sous le couvert des arbres, dès que leurs pieds touchèrent le sol, la teinte de leurs uniformes changea pour adopter celui de la terre ; passant du jaune au rouge. La file de six hommes se déploya, l’éclaireur s’arrêtant au pied de la clôture ; le boîtier blindé du pylône avait explosé, visiblement après avoir essuyé le tir direct d’une grenade autopropulsée.

_ Quelqu’un est passé avant nous.
_ Merde, on arrive trop tard ; on entre !

D’une pression sur un des nombreux boutons situés au dessus du ponté de leurs armes, les marines activèrent les générateurs de bruit blanc qui annulaient le son du tir, puis sans un mot, se disposèrent sur le côté de la porte blindée avant de s’engouffrer à l’intérieur. Depuis leur position dans la jungle, sur les côtés de la piste, Simon et Kurt écoutaient les communications radio de leur équipe.

_ C’est une vraie boucherie.

Il n’y avait pas besoin de décrire l’horreur qui régnait à l’intérieur du laboratoire, l’imagination des marines avait assez de références en la matière pour illustrer ce que recouvrait le terme boucherie.

_ On a fait un recoupement, certains membres de l’équipe d’Avalon sont manquants ; il n’y a plus de jus ici, Sarge je vous envoie la fréquence SAR, localisez les.

D’une poussée, Simon fit émerger une pointe de stylet plastique du long de la dernière phalange de son index droit, puis il tapota quelques commandes sur l’écran de l’ordinateur de combat, fixé à son poignet gauche.

_ Six implants Avalon, huit kliks Nord-Est.
_ C’est la position d’un village indigène.

Un moment de silence passa, le lieutenant réfléchissait ; c’était un rapide, il était agréable de servir sous ses ordres car Dee-One était une petite équipe, la hiérarchie y était quelque chose de naturel et moins contraignant que dans une unité conventionnelle... C'était presque une famille.

_ Les disques durs sont à l’abri, rassemblement en dehors du complexe.

La nuit tombait, les marines firent le point en dehors ; le lieutenant déplia une matrice souple et afficha la carte de la zone dessus. Puis déployant son émetteur, il contacta l’orbite.

_ Catcher, ici Big Bad Wolf un-un.
_ Catcher actual, parlez Big Bad Wolf.
_ Objectif un atteint, aucun survivant sur zone, les données sont au chaud ; six otages possibles à Objectif deux, demandons instructions, terminé.
_ Procédez avec prudence, neutralisez tous les hostiles d’Objectif deux et récoltez des renseignements sur la possible implication d’Objectifs trois et quatre, accusez réception.
_ De Big Bad Wolf, bien reçu ; précisez règles d’engagement, Catcher.
_ De Catcher Actual, tous les indigènes d’Objectif deux doivent être considérés comme hostiles ; mission prioritaire, les otages sont considérées comme pertes acceptables, terminé.
_ De Big bad Wolf, bien reçu ; je quitte la fréquence, terminé.

Le lieutenant avait l’air sombre, ce n’était pas une illusion due au camouflage sur son visage ou à l’ombre projetée par son chapeau et son ghillie ; une sorte de jubilation malsaine émanait de son regard.

_ Vous avez entendu les ordres ; on encercle le village et on lance l’assaut à l’aube…

Les fantômes de Dee-One s’éparpillèrent dans la jungle.

La pluie tombait, lourde et sale ; le processeur atmosphérique finissait son travail, et la nouvelle atmosphère devait s’accorder avec l’humidité nécessaire à l’implantation de la flore artificielle ; cette jungle jaunâtre était d’origine transgénique, elle avait poussée en quelques mois seulement… Un monstre de laboratoire.
Quelque part, les marines du détachement un de Force Recon pouvaient s’estimer heureux ; s’ils étaient intervenus lors de la troisième phase du processus de terraformation de Livingstone-4, ils auraient été dévorés par les moustiques. La vie animale attendrait encore avant d’être implantée sur la colonie. Pour l’instant, Dee-One chassait un autre type d’animal ; il était convenu que pour chaque expédition scientifique envoyée sur une planète par une corporation, les Nations Unies pouvaient faire émigrer plusieurs lots de réfugiés avec elle. Décision humanitaire en principe ; ces réfugiés choisis parmi les populations du tiers-monde, dont la terre était peu à peu épurée, servaient de cobayes. Ces échantillons tests étaient utilisés pour observer l’adaptation des humains à l’environnement… Lorsque les morts et les malformations cesseraient, alors les colons pourraient s’installer sans risque. Il semblait cependant qu’un des groupes test de Ligvingstone-4 se soit retourné contre ses observateurs, et il était probable qu’un concurrent des laboratoires Avalon lui avait fourni les armes pour ce faire.

Le village était encerclé, les marines avaient pris leur temps ; désarmant piège après piège avant de poser les leurs. Les africains composant la population d’Objectif deux n’étaient pas des soldats, malgré l’intervention de conseillers militaires, certains principes leurs manquaient ; une fois le laboratoire mis à sac, ils pensaient avoir supprimé toute opposition de la face de Livingstone-4, en conséquence aucune patrouille armée ne sortait du village, c’était à peine s’il y avait des sentinelles disposées à la lisière de la jungle.

Les marines observaient, regardant les gens autour du feu, notant ceux qui prenaient la parole, exerçaient l’autorité, portaient des armes et des trophées. Des cibles prioritaires furent désignées, leurs habitations repérées lorsqu’ils les regagnèrent ; puis lentement… L’aube approcha.

Trois appels radios brefs, six minutes passent, les trois sentinelles sont mises au silence… Définitivement. Les ombres se déplacent, les cibles prioritaires d’abord ; neutraliser les hommes armés, capturer leurs leaders, récupérer les otages ; puis rassembler toute la population au centre du village alors que le soleil se montre. Le tout n’a pas pris dix minutes.

Simon intime l’ordre aux indigènes de ne pas bouger, les quelques rudiments de swahili appris lors de ses opérations en Afrique se montrent utiles, mais un coup de crosse dans la mâchoire d’un adolescent trop véhément est autrement plus efficace. C’est un peuple qui connaît la violence, plus que tout autre. Un des scientifiques d’Avalon parle, trop vite, sa voix saute d’un ton à l’autre ; la folie se lit dans ses yeux… Mêlée au soulagement. Ils ont tué quasiment sans discernement, les femmes ont été prises vivantes, les hommes responsables des soins aux locaux aussi ; le reste des gens d’Avalon a été massacré. Le Lieutenant note, n’arrive pas à calmer l’homme, se tourne vers Patch.

_ Medic, sédatif.
_ Trois des femmes ne sont pas en état de voyager mon lieutenant.

Comment pourraient-elles ? Battues, violées, deux d’entre elles sont catatoniques… Après l’excitation contenue de l’assaut, c’est la rage qui commence à monter chez les marines.

_ Scope, tu prends la tête du détachement ; dépliez des brancards et évacuez les otages jusqu’à la LZ. Je reste avec Sarge et Gunner pour terminer la mission, rendez-vous pour extraction à zéro-sept zéro-zéro.

Kurt comprend, il se place dans le dos des prisonniers et déplie le bipied de sa mitrailleuse ; un homme crache sur Simon, il peut lire dans ses yeux la compréhension, l’attente de la mort… A côté de lui, une femme pleure, son bébé dans les bras elle essaye demande pitié. Le lieutenant fait quelques pas de côté, et entraîne un prisonnier à l’intérieur d’une case pour l’interroger. Des hurlements entrecoupés de cris, de sanglots ; le lieutenant ressort dix minutes plus tard en essuyant la lame de son K-Bar ; Simon vide ses poumons d’un grand souffle, comme un boxeur, il intercepte son CO et lui parle à voix basse.

_ Lieutenant, on a neutralisé tous les hostiles du village, non?
_ Les ordres sont clairs Sarge, on ne nous a pas dit de faire des prisonniers.

Les otages et le reste des gars ont disparu en suivant la piste qui mène au laboratoire, le moment est arrivé.

_ Gunner !

Les corps tremblent et tombent, puis Kurt cesse de tirer, le lieutenant s’assure qu’ils sont morts, tirant à chaque fois une balle dans la tête de chacun des cadavres. Simon le rejoint, retourne le corps de la femme avec sa botte, le bébé est là, il pleure. Le lieutenant le regarde, Simon lui fait un signe négatif de la tête, il s'avance tout de même avec son arme en avant; Simon s'empare du canon de l'arme du lieutenant et la détourne, ils luttent sans bouger, en silence.

_ Ecartes-toi sergent, qu'est-ce que tu vas faire, prendre ce gosse avec toi ?
_ C'est la dernière des saloperies mon lieutenant, les marines ne font pas ce genre de choses.
_ C'est déjà fait sergent, nous avons des ordres, tu veux prendre ta radio et dire à Catcher de se les coller au cul?
_ Catcher peut m'envoyer en cour martiale, mais il y a un autre juge que je crains beaucoup plus que tous les tirbunaux militaires, lieutenant.
_ Ecartes-toi, c'est un ordre.
_ Non.

Une détonation, Kurt l'a fait ; Simon lâche l'arme du lieutenant et prend le chemin de la piste sans un mot... Son uniforme, son drapeau et son âme sont définitivement salis.

Sept heures, les marines ont sécurisé le périmètre autour du laboratoire ; la navette arrive ; on embarque les otages et les disques dur du laboratoire. De nouveaux ordres sont tombés entre temps, les Objectifs trois et quatre doivent être sécurisés eux-aussi, les cadavres emballés ; des navettes appartenant à Avalon passeront récupérer les corps et stériliser les sites… Catcher actual est très satisfait de l’action de Dee-One, Avalon a promis une prime exceptionnelle pour compenser cet imprévu de dernière minute.

Pour soixante-huit pertes humaines, un investissement de quatre milliards d’euros a été sauvé ; ce qui se traduit en le versement quasi-immédiat de douze millions de dollars aux différents protagonistes et intermédiaires ; le profit à long terme pour Avalon, lui, est inestimable.

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