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L'Idolâtre

La porte de l’Idolâtre n’exerçait plus sont pouvoir de fascination sur Cassandre, derrière elle planqué dans la ruelle on aurait bien dit qu’Harrison était prêt à réduire l’endroit à l’état de gravats au moindre signe de problèmes. Le buzzer de la sonnette mourut dans un couinement d’agonie électrique alors que la voix tonitruante réitérait son avertissement

_C’est un club privé.

_Et aussi le seul où on a pu voir Janus Mirror en concert…

Le ton blasé de Cassandre devait avoir fait ses preuves car le portier, un géant afro-américain sans aucune pilosité apparente sur le visage ouvrit la lourde porte de fer pour regarder la nouvelle venue.

_Vous avez votre masque ?

_Pardon ? Euh, oui bien sûr, tenez le voilà…

Le portier ne fit pas mine de reconnaître le faciès du démon de Nôh, il se poussa juste avec un geste l’invitant à entrer ; les choses devenaient un peu plus compliquées que ne l’avait suggéré le plan de départ ; la porte se referma derrière elle et Cassandre prit un moment pour scruter les alentours, habituant ses oreilles au bruit assourdissant de la musique industrielle et passant le pas de placer le mystérieux masque sur son visage. Le portier retourna s’asseoir dans un fauteuil de dentiste en cuir noir où opérait un perceur grimé d’un masque de gardien de hockey. Alors que Cassandre faisait ses premiers pas derrière le rideau du vestibule et vers le seul point de stabilité où son esprit pourrai trouver ancrage, la musique changea pour se tourner vers de l’électronique charmeur et vénéneux, sur son chemin vers le bar d’autres faces masquées se retournaient et semblaient lui adresser de petits signes de tête entendus. Elle ne pensait même plus à Harrison, s’il arriverai à entrer ou pas ; elle tourna son attention vers le bar où un jeune homme blanc voir pâle comme la mort servait, il était fin et nerveux comme du bois noueux et portait un gilet de coton noir à col mao sur sa peau nue ; ses yeux noirs semblaient terriblement vifs même derrière un demi-masque grotesque de comédia del arte  que l’on devait forcément se tourner vers lui en premier ; avec un parler net et juste teinté par un léger accent méditerranéen, peut-être grec, il vînt vers elle.

_Bonsoir.

_Bonsoir.

_Que puis-je vous servir ?

_Chartreuse on the Rocks s’il vous plaît.

Il s’exécuta sans empressement et revînt avec un verre bas empli de poison vert et délicieusement glacé ; Cassandre se demanda alors comme elle allait faire pour goûter sa consommation sans enlever son masque, en face d’elle le serveur attendait posément comme pour un signe, une goûte de sueur glacée dégoulina le long de son dos. 

Dehors Harrison sonna à son tour pour s’entendre réciter l’inévitable litanie, puis nerveusement il écrasa trois fois son doigt sur le bouton de plastique avant que la porte ne s’ouvre devant le géant noir dont les arcades sourcilières s’ornaient maintenant de pointes de métal.

_T’as pas compris le paumé ? Casse-toi !

_Je suis flic alors barre-toi de mon chemin avant que je décide que ta tronche me revient pas…

A la surprise de Harrison le géant ne se poussa pas mais son coude lui défonça le nez dans un craquement sinistre, le policier atterrit sur le dos dans la ruelle le souffle coupé. Alors que les pieds disproportionnés de l’armoire à glace atterrirent dans une flaque juste devant, derrière lui la porte se referma dans un claquement sinistre.

« Je t’avais dit de te barrer cafard, maintenant tu vas dérouiller. »

Le premier coup de pied atterrit bien dans les côtes faisant décoller Harrison convenablement avant qu’il n’aille s’écraser dans les poubelles un peu plus loin, le sang lui coulait de la bouche, il leva la main lentement comme pour faire signe qu’il avait eu son compte mais dans un rire rauque et satisfait le videur l’empoigna pour le scotcher au mur et le larder de coups de poing.

A l’intérieur Cassandre avisa les serviettes et cure-dents sur un bord du comptoir puis elle s’empara avec grâce d’une paille coudée tout en poussant le soupir irrité d’une habituée mal servie, le serveur alla immédiatement s’occuper d’un autre client. A côté de Cassandre un tabouret glissa alors q’une femme s’y installait, son masque en fer forgé était primitif, il évoquait une puissance barbare que l’on aurait pas soupçonnée dans le corps gracile de son propriétaire.

_Salut, alors c’est vous la nouvelle.

_Vous devez faire erreur.

_Ca doit être excitant la première fois non ? Moi par exemple je n’arrive pas à m’en lasser.

_Pardon je ne comprends pas de quoi vous me parlez là, et qui êtes-vous je n’arrive pas à me souvenir.

_Normal je suis D et on ne s’était jamais encore rencontrées Cassie mais on a tout pour devenir les meilleures amies du monde puisqu’on a le goût du meurtre en commun.

Cassandre hoqueta de surprise, saisie par le propos de l’étrange D, les mots comme « meurtre » avaient la consonance sucrée d’une gourmandise dans sa bouche ; elle chercha Harrison du regard, voilà qu’il lui manquait soudainement…
Page vue 60 fois, créée le 05.09.2007 22h36 par guinch
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