logo
Accueil liste Commenter

Le Lion

Cette nuit là, Cassandre revit le détective Harrison ; il vînt lui poser quelques questions relatives au rapport d’autopsie de Jacob qu’il persistait à appeler John Doe, elle se décida alors à lui parler de sa théorie du masque. Apprenant qu’elle était entrée chez la victime et s’était emparée d’une pièce à conviction, Harrison fit montre d’une patience exemplaire, maussade il écouta chaque détail en grommelant, jetant des coups d’œil attentifs aux ridules se formant à la surface de son gobelet de café sur la table du bureau. Quand enfin le grand homme se décida à parler se fut d’un air grave :

« J’ai enquêté sur votre Jacob, il faisait partie d’un groupe underground appelé le miroir de Janus ; tous les membres en portaient des masques à ce qu’on m’a raconté, un truc symbolique. Votre rapport me porterait plutôt à fouiller de ce côté, vous savez ces gars là sont complètement siphonnés avec leurs fringues noires et leurs rituels pseudo-sataniques, ça m’étonnerait pas que ce soit une connerie du genre effectuée par quelques gus bourrés d’acide jusqu’à l’œil. »

Bien que Cassandre ait trouvé le propos réducteur elle n’avait pas grand chose à ajouter, c’était typique du personnage d’Harrison comme elle se le représentait mais d’un autre côté il avait bien plus l’habitude des homicides qu’elle.

Il avala son café froid d’un trait comme le jour de leur rencontre et reposa le gobelet sur la table.

« Le jetez pas toubib, si j’ai rien de nouveau je reviendrai traîner ma carcasse dans le coin ; le central est aussi vide que votre officine la nuit et tout ça passe trop lentement. »

Il sortit assura l’arme qu’il portait dans un holster de cuir usé à sa ceinture puis remit la veste anguleuse qui soulignait l’imposante carrure de ses épaules ; Cassandre posa ses pieds sur le bureau et fit tourner le masque entre ses mains d’un air absent, repensant à ce que Harold lui avait dit d’Harrison lors de leur dernière pause café.

« Il est passé détective juste avant que je raccroche ma plaque à la métro, seulement son partenaire s’est fait éventrer sur sa première affaire et y est resté ; il paraît qu’il s’est jamais vraiment remis de sa dépression et qu’il achète toujours des cachets au marché noir, en tout cas je sais de source sûre que c’est un sacré fils de pute si vous me passez l’expression docteur, du genre violent. »

Cassandre avait du mal à imaginer Harold quelques années plus tôt en sergent de rue, Harold avait-il lui aussi été dur et peut-être violent au contact de la lie des rues ? Difficile à dire face à ce visage parcheminé de rides mais toujours détendu, il avait vu des choses, ça c’était sûr, mais lui en parlerait-il un jour ? Probablement pas, il devait fuir ces souvenirs comme le silence de ses nuits ; peut être étais-ce eux qui murmuraient pour Harold après tout. Sortant de sa rêverie, Cassandre reposa précautionneusement le masque sur le bureau et fouilla la boîte du courrier : une large enveloppe de papier kraft adressée par le laboratoire y attendait. Les analyses toxicologiques révélaient un faible taux d’alcoolémie et surtout la présence d’agents chimiques provenant probablement d’une drogue mais dont l’assemblage particulier n’était pas répertorié, encore des questions. Harrison ne repassa pas cette nuit là, sa nouvelle piste avait du se révéler fructueuse ; alors qu’elle quittait le service, Cassandre entraperçut le comte Orlock arriver en avance comme à son habitude, contrairement à la plupart des gens à cette heure du matin, il avait l’air parfaitement éveillé, encore un point pour le mythe du vieux vampire, il s’en régalait décidément. Il lui lança un de ses sourires froids et lui souhaita un « bon week-end », Cassandre réalisa alors qu’on était samedi matin et qu’elle ne serait pas de garde ce soir ; autrefois elle aurait passé la soirée avec François mais aujourd’hui elle était libre, mais libre de faire quoi ?

Page vue 52 fois, créée le 05.09.2007 22h25 par guinch et modifiée le 05.09.2007 22h29 par guinch (#4)
Motorisé par R3.3.3 Tali